extraits de fatigue

Tandis que vision et sentiments se mêlaient, chaque image devenant aussitôt un tourment qui la poussait à regarder ailleurs, l'image suivante prolongeant ce tourment, se créaient ainsi des points morts où le manège infernal du monde extérieur lui laissait fugitivement un peu de repos. En ces instants, elle n'était que fatiguée, se remettait du tourbillon, s'absorbait sans penser à rien dans la contemplation de l'eau.

[...]

La mer lui plaisait, il y avait souvent de la tempête la nuit, rester éveillée n'avait plus d'importance. Elle acheta un chapeau de paille à cause du soleil et le revendit le jour du son départ. Tous les après-midi elle s'asseyait au bar et buvait un espresso.

-- Peter Handke, Le malheur indifférent, Gallimard, coll. Folio, p. 93 et 98