avant de m'endormir

Quelques mots s’étaient pointés, au bord de la falaise du sommeil, hier. Ces espèces de mots qui flottent et qui, au moment de fermer l’œil, vous prennent le cœur et le font paniquer. La marée haute qui prend par surprise.

Je ne me souviens plus exactement ce que ces mots impliquaient. Des mots usés, des mots galets qui voletaient à la surface d’une eau trouble. Et plouf. À chaque fois, je me dis que je devrais me lever, aller à la cuisine, noter le tout sur un coin d’enveloppe ou sur un Post-it – s’il en reste. À chaque fois je me dis que le mieux serait d’amener un calepin près du lit et, au moins, y écrire à l’aveugle.



J’écris ceci en espérant que ça me revienne, en regardant de temps à autres les nouvelles fissures qui garnissent la peau blanche du plafond. Le tic-tac de l’horloge. La gorge serrée du frigo. L’impression que tout coule entre mes doigts comme des chenilles en manque de soie.

L’impression d’écrire en trémolo sous le derme, de chiquer des oublis, des souvenirs qui vont et qui viennent, des souvenirs qui creusent le sable humide de la plage. Écrire le renflement des voiles prises par le vent – ce renflement qui porte les bateaux de fortune vers l’île intérieure. Se laisser au vent pour mieux revenir, sur des joues toutes tissées de blanc.