ville, rives, fatigue, bonheur et cie.

Extraits de Chemins aux vents, de Pierre Sansot, paru chez Payot & Rivages:

«Les chemins d'une ville ne coïncident pas toujours avec les boulevards qui la découpent ostensiblement, à tel point que, parfois, si nous quittons un trottoir pour un trottoir opposé, nous changeons de rive.» (p. 128)

«J'ajouterai que le bonheur d'emprunter un chemin se perçoit de multiples façons presque opposées. Il y a ces chemins lumineux, ces corps glorieux, mais il existe aussi ces chemins qui nous blessent jusqu'à l'épuisement - et parce qu'ils nous blessent jusqu'à nous écorcher, ils entrent dans nos talons et feront partie de notre patrimoine de déambulateur.» (p. 136)

«Une ville poétique. Ce n'est pas une belle image mais une ville bien réelle, insistante au point de nous inciter à l'imaginer. Elle nous met en effervescence. Nous nous soumettons à la nécessité de travailler cette matière précieuse par notre regard, par nos pas, par des rêveries actives. Nous la recréons à travers un envol de parcours possibles, de récits conformes à ce que nous croyons être son génie. Il serait faux de concevoir une ville figée dans la pierre.» (p. 144)

Extrait de L'invention du quotidien 1. Arts de faire, par Michel de Certeau, paru chez Gallimard:

«L'île de la page est un lieu de transit où s'opère une inversion industrielle: ce qui y entre est un "reçu", ce qui en sort est un "produit". Les choses qui y entrent sont les indices d'une "passivité" du sujet par rapport à une tradition; celles qui en sortent, les marques de son pouvoir de fabriquer des objets. Aussi bien l'entreprise scripturaire transforme ou conserve au-dedans ce qu'elle reçoit de son dehors et crée a l'intérieur les instruments d'une appropriation de l'espace extérieur.» (p. 200)