whiskey light


Durant l’été, lors des nuits chaudes et humides, ça leur arrive encore. Ils se retrouvent sous la lumière dorée des projecteurs du terrain de baseball. Enfermés dans leur bulle d’amour naissante, ils dansent dans la poussière sans flafla. Il n’y a pour seule musique que le bruit des voitures passant sur la rue Moreau, les cris de leurs amis, au troisième but, qui font circuler la king size, la cigarette et le joint – le chandail de laine et la chaleur humaine aussi. Pas besoin de prétexte pour faire la fête. Il suffit d’un lendemain et le tour est joué.

[...]

Les photographier ne servirait en rien. L’objectif n’arriverait pas à saisir cette lumière qui, bien plus que des jeux blonds et ambrés des projecteurs, vient de l’intérieur. Ces soirées entre amis, perdus au bout d’un chemin de terre battue où le feu bien nourri réchauffait les pieds gelés par la rosée; où la bière, la vodka et le whisky couraient de main en main pour nous engourdir la tête et le cœur. Au bout de ce chemin, parfois, on dansait à la belle étoile alors que le feu crépitait encore – d’autres avaient échoué dans la tente où s’étaient simplement contentés d’une pile de couvertures et d’une chaise pliante, bouteille à la main. Deux ou trois heures plus tard chacun retournait dans son bled pour bosser.